Messieurs qu'on nomme grands,
"
Je vous écris cette lettre,
que vous lirez peut-être, "
vous sentant coupables un instant.
Des gens meurent de froid
Ils n'ont pas de toit
Et d'autres de misère
Vous direz c'est leur croix
Vous n'y êtes pour rien.
Messieurs qu'on nomme grands
je vois souffrir des mères,
je vois le tourment des pères
et geindrent les enfants.
Des humains meurent de faim.
Vous faîtes semblant
de leur tendre la main.
Mais avez-vous donc une âme?
L'indigence est infâme.
Mais vous n'y êtes pour
rien.
Messieurs qu'on nomme grands
A vos enfants vous pourrez dire:
Qu'avant vous c'était
pire !
Mais vous n'y étiez
pour rien.
Et si de vos compromis et vos
actes
ils en parlent
et s'inquiètent,
vous direz : mais c'est pour
vos biens,
Quant au peuple d'en bas
on lui donne des miettes.
Mais vous n'y êtes pour
rien.
Messieurs qu'on nomme grands
vous direz lors de votre grand âge,
au jour du grand voyage,
Oui ! J'avais le pouvoir.
J'ai dédaigné des
mères.
Je n'ai pas plaint
les pères.
J'ai sacrifié des
adolescents.
J'ai négligé de
pauvres gens.
Mais je n'y étais
pour rien.
Messieurs qu'on nomme grands
Ne les entendez-vous pas pleurer?
Beaucoup ont froid,
En masse, ils ont faim,
D'autres n'ont pas de toit,
Votre cœur est-il de marbre?
vous n'avez même pas une
larme !
Le peuple devient marionnette
pour vous engraisser.
Mais je ne veux pas vous agacer!
Et je vais essayer d'être
honnête
Car bien sûr ! vous n'y êtes
pour rien.
Fin
Les vers
2 et 3 sont de Boris Vian (le
déserteur)